Il
fallait oser ! Dans un entretien radio ce matin, le socialiste Thomas
Dermine, secrétaire d’État à la relance, estime (sans rire)
qu'on ne paie pas trop de taxes en Belgique ! Invité à réagir sur
la sortie du président du MR, Georges-Louis Bouchez, selon qui il
est essentiel de baisser les impôts sur la classe moyenne, Dermine a
juste concédé qu'il y a avait "trop d'impôts sur certaines
classes de travailleurs, sur certains types de biens" et qu'il
faut "une fiscalité plus juste". Mais - du moins en ce qui
concerne celle sur le travail -, le secrétaire d’État préfère parler de contributions plutôt que d'impôts. Contributions,
dit-il, qui servent à financer la solidarité dont on peut mesurer
l'importance en cette période de crise sanitaire. L'argument est un
peu facile et ne résiste pas à l'analyse.
Petit
rappel façon "La rage taxatoire pour les nuls". En termes
d'impôts sur les revenus, notre pays compte 4 tranches d'imposition
: 25 % en dessous de 13.540 euros annuels, 40 % jusqu'à 23.900
euros, 45 % jusqu'à 41.360 euros et 50 % au-delà de cette somme
(qui ne représente jamais que 3.430 euros par mois). Le travailleur
belge est le plus taxé au monde. Le dernier rapport de l'OCDE,
l'Organisation pour la Coopération et le Développement Économiques,
faisait ressortir chez nous un taux de taxation global de 51,5 % pour
une personne sans enfant. Sur 100 euros bruts gagnés, plus de la
moitié part donc en impôt sur les personnes physiques et
cotisations de sécurité sociale. Aucun des 36 autres pays passés à
la loupe n'a un taux supérieur à 50 %, la moyenne OCDE étant de
34,6 %. Pour un couple avec deux enfants à charge, la pression en
Belgique tombe certes à 34,9 %... mais elle est toujours bien
supérieure à la moyenne qui n'atteint pas 25 %.
Une
ponction à laquelle s'ajoute celle des taxes diverses, à différents
niveaux de pouvoirs et sur différentes matières. TVA, précompte
immobilier, droits de succession, taxe de circulation et de mise en
circulation automobile, taxe sur les immondices, etc. La flambée
actuelle des prix des produits énergétiques a remis en lumière la
part démesurée que prend l’État par rapport au coût réel de
l'essence, du mazout, du gaz et de l'électricité.
Si encore ce véritable racket organisé permettait à la Belgique
d'être un pays de cocagne... mais non ! Nos services publics sont
inefficaces, gangrenés par la bureaucratie; de nombreuses
infrastructures sont dans un état lamentable (voyez les bâtiments
scolaires ou judiciaires, les routes, etc.); la qualité de notre
enseignement ne cesse de se dégrader; les tribunaux sont engorgés;
l'emploi ne décolle pas, faute notamment de formations adéquates,
les faillites de PME et restructurations sauvages de grandes
entreprises se multiplient alors que des multinationales étrangères,
attirées par une fiscalité plus que complaisante, n'hésitent pas à
délocaliser une fois qu'elles ont pompé toutes les aides publiques
possibles, arguant d'un coût du travail forcément trop élevé.
Tandis qu'une minorité s'enrichit, la majorité des Belges voit son
patrimoine et son pouvoir d'achat s'appauvrir, parfois jusqu'à
atteindre le seuil de pauvreté. La dette globale du pays dépasse
depuis longtemps le PIB. Ce qui ne diminue pas, c'est le nombre de politiciens, environ un
élu pour 800 habitants. Une soixantaine de ministres fédéraux,
régionaux, communautaires, et près de 500 députés et sénateurs.
Des politiciens qui, avec de hauts fonctionnaires, cumulent 900.000
mandats ! Et certains trouvent encore le moyen de "taper dans la
caisse" à coups de salaires pharaoniques et de jetons de
présence bidons dans des structures supposées être au service des
plus faibles (souvenez-vous du Samu Social, entre autres), dans des
intercommunales fourre-tout (Publifin) ou à travers des nébuleuses
labyrinthiques de type Nethys. Certaines structures archaïques,
quasiment des coquilles vides comme les provinces, ne servent plus
qu'à garantir l'emploi de véritables parasites, alors que des ASBL
subsidiées par les pouvoirs publics échappent à tout contrôle
comme l'a encore montré un récent reportage de la RTBF. C'est ça, monsieur Dermine, la réalité belge. C'est à ça que
servent notamment les taxes et les impôts sous lesquels nous
croulons : à entretenir un système et une caste qui ont depuis
longtemps prouvé leur incompétence. Oui, nous en payons beaucoup
trop, à cause de la gestion calamiteuse de partis sclérosés dont
le vôtre, au pouvoir quasi sans discontinuer depuis la création de
la Belgique fédérée et régulièrement au fédéral. Prétendre le
contraire, c'est faire insulte à tous ceux qui paient votre salaire
et vos privilèges.